Sous une pluie battante, la réunion du conseil d’administration de la FECIF s’est tenue à l’extrémité d’un hall d’exposition à Lyon, en France. Dans le hall derrière nous, quelque 8 000 participants (conseillers financiers, courtiers et autres) s’étaient rassemblés pendant deux jours pour le salon annuel Patrimonia – ce hall bondé était-il un bon signe pour le conseil financier en Europe, ou était-il complètement coupé du monde ?
L’industrie française du conseil financier en pleine forme
Patrimonia est une véritable ruche, où des milliers de conseillers financiers se sont réunis pendant deux jours à Lyon. À la fois salon et congrès, il s’agit du plus grand rassemblement professionnel de ce type en France. C’est l’endroit où tout le monde rencontre tout le monde, et un bon endroit pour évaluer la santé du marché.
Le conseil financier est apparemment en plein essor en France (comme ailleurs sur le continent), ce qui n’est pas surprenant : Les ménages européens épargnent de plus en plus, car ils s’inquiètent de l’impact du vieillissement de la population sur leur sécurité financière ; ils ne trouvent pas auprès des banques les conseils dont ils ont besoin sur des questions aussi complexes – et ne sont pas non plus prêts à prendre conseil sur Internet.
Le secteur français du conseil en gestion de patrimoine s’est rapidement consolidé au cours des cinq ou six dernières années, les fonds d’investissement ayant financé une vague de fusions, créant une douzaine de plates-formes de consolidation, et des sociétés gérant jusqu’à 20 milliards d’euros d’actifs. Avec plus de 6 000 entreprises enregistrées en France, et des créations chaque année plus nombreuses que les fusions, les cibles de consolidation ne manquent pas. Et si l’on compare avec le marché britannique, qui compte plus de 30 plateformes de consolidation, dont les plus importantes rassemblent plus de 150 milliards d’euros d’actifs sous gestion, la France dispose encore d’une marge de croissance considérable.
Les sociétés de capital-investissement, à la fois fournisseurs et actionnaires
En fait, les sociétés de capital-investissement étaient très visibles à Lyon, avec plus de 50 stands dans les halls d’exposition : elles étaient aussi nombreuses que les sociétés d’investissement immobilier et les assureurs-vie, qui constituent la base de l’épargne des ménages français depuis une génération.
Les sociétés de capital-investissement étaient en mode vente plutôt qu’en mode achat, car les ménages aisés conseillés par des professionnels constituent une part croissante des fonds de ces sociétés – et le capital-investissement est une part croissante, dynamique et très rentable de l’activité des conseillers financiers. Les investissements en capital-investissement sont devenus la pierre angulaire de la stratégie d’investissement des ménages aisés, au même titre que la pierre-papier ou les produits structurés.
Le franc succès du produit d’épargne retraite PER
Un autre élément clé qui a contribué à la croissance récente du marché français est le lancement d’une nouvelle forme de produit d’épargne retraite, le PER (Plan d’Epargne Retraite). Le PER a été créé par la loi PACTE en 2019 et a rassemblé sous un régime fiscal unifié un certain nombre de produits existants, collectifs et individuels, assurantiels et bancaires.
Le PER a d’abord été nourri par des transferts de produits de retraite existant précédemment (PERCO, Madelin, article 39, article 83, etc.), comme c’est souvent le cas. Mais il a rapidement pris une autre dimension, atteignant plus vite que prévu 100 milliards d’euros, dont moins de la moitié provenant de transferts. Et l’un des moteurs de ce succès a été l’activité des sociétés de conseil financier auprès de leurs clients (Groupe Premium en particulier), ainsi que le récent LBO très réussi du groupe ERES, spécialiste de l’épargne salariale et de la retraite.
En résumé, la combinaison de la demande des ménages, d’un produit lisible (et fiscalement avantageux) et de l’activité des conseillers financiers a créé une success story pour le PER, qui a bénéficié à toutes les parties impliquées et a contribué à la sécurité financière des futurs retraités.
Ce succès pourrait-il montrer la voie au reste de l’Europe ?
Alors que la nouvelle commission prend place et considère ses priorités pour les cinq années à venir, et que l’EIOPA semble déterminée à promouvoir le développement de l’épargne retraite à travers l’Europe, y a-t-il une opportunité pour une réforme réussie ? Ce serait un rayon de soleil bienvenu après la pluie…
Simon Colboc
Publié le 04.11.24