L’intelligence artificielle, un outil sans biais de genre ?

Des études scientifiques récentes ont mis en lumière des différences significatives dans la façon dont les hommes et les femmes s’approprient les nouvelles technologies et les utilisent.

Si l’on prend l’exemple des applications de navigation GPS comme Waze ou Google Maps, les recherches montrent que les hommes ont en moyenne une plus grande confiance dans les recommandations fournies par ces outils, en même temps qu’ils font confiance à leurs capacité de navigation, tandis que les femmes ont tendance à vérifier davantage les informations par elles-mêmes[1][2], tout en s’attachant aux repères spatiaux.

Pourrait-on faire une hypothèse originale ? que l’on peut transposer ces résultats à l’utilisation de L’IA, en particulier dans le conseil ?

En l’absence d’étude qui le confirme ou l’infirme, il est permis de penser que des différences de comportement similaires pourraient s’observer dans l’utilisation des outils d’IA par les consultants et consultantes.

Imaginons la scène, où interviendraient des biais de genre dans l’utilisation de la technologie. Ici, nous extrapolons les conclusions des études sur l’utilisation des applications de navigation à la préparation d’un rendez-vous. Le consultant s’appuie avec assurance sur les recommandations générées par un modèle prédictif pour alimenter la définition d’une stratégie à adopter. La consultante, elle, prend le temps de challenger les résultats de l’algorithme, de les confronter à son expérience et à son intuition métier. Le premier voit l’IA comme un outil d’aide à la décision là où la seconde la considère comme un support nécessitant un regard critique[3][4].

Au-delà de la confiance, les priorités et les attentes vis-à-vis de l’IA pourraient aussi différer. Les consultantes chercheraient à utiliser ces technologies pour fournir à leurs clients des insights sur-mesure. Les consultants seraient plus focalisés sur les gains de productivité et d’efficacité permis par l’automatisation des tâches[5][6].

Bien sûr, il ne s’agit là que d’hypothèses un peu provocantes qui ne s’appuient pas sur une base scientifique.

Mais une chose est sûre : pour tirer le meilleur parti de l’IA, les cabinets de conseil doivent être attentifs à ces potentiels biais et mettre en place les garde-fous nécessaires.

Cela passe d’abord par des formations adaptées permettant à tous les consultants, hommes et femmes, de développer une compréhension fine du fonctionnement et des limites des algorithmes[7][8]. L’enjeu : instaurer un climat de confiance raisonnée, ni naïve ni excessivement méfiante dans les outils, leurs résultats, leurs capacités et leurs limites.

La composition d’équipes projet mixtes et diverses est un autre levier clé. En croisant les regards et les sensibilités, on favorise une utilisation plus équilibrée et pertinente de l’IA, tirant parti des complémentarités[9][10].

Enfin, l’adoption de l’intelligence artificielle doit s’accompagner d’une réflexion éthique exigeante. Des processus robustes doivent être mis en place pour auditer les algorithmes, traquer les biais discriminatoires et s’assurer que les recommandations générées sont alignées avec les valeurs de l’entreprise[11][12].

En cultivant cette « IA-Q » (intelligence artificielle au quotidien) au niveau individuel et collectif, nous ferons de l’IA un véritable atout, au service de l’épanouissement de nos collaborateurs et de notre performance interne et de la performance de nos clients.

Pierre Courrieu

Sources : 
[1] https://www.scirp.org/journal/paperinformation?paperid=62732
[2] https://www.linkedin.com/pulse/consulting-40-how-ai-redefining-service-delivery-
[3] https://www.forbes.com/sites/forbesbusinesscouncil/2023/09/26/ai-in-management-consulting-emerging-solutions-and-a-path-forward/?sh=58d5e085744e
[4] https://hbr.org/2019/10/what-do-we-do-about-the-biases-in-ai
[5] https://www.nature.com/articles/s41599-022-01043-5
[6] https://innodata.com/best-approaches-to-mitigate-bias-in-ai-models/
[7] https://www.mckinsey.com/featured-insights/artificial-intelligence/tackling-bias-in-artificial-intelligence-and-in-humans
[8] https://link.springer.com/article/10.1007/s00146-023-01747-5
[9] https://www.alpha-sense.com/blog/trends/generative-ai-consulting/
[10] https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0360131512003053
[11] https://arxiv.org/ftp/arxiv/papers/2304/2304.07683.pdf
[12] https://arxiv.org/pdf/2303.09808.pdf

Publié le 30.05.24